·                    4. Marie-Line Groussier: "La forme be+ing, expression de la prédication de l'état de participation de l'actant principal (ou secondaire) à une occurrence de procès". 4. Marie-Line Groussier: "La forme be+ing, expression de la prédication de l'état de participation de l'actant principal (ou secondaire) à une occurrence de procès".

Le titre de la prestation donne le ton de ce qui va suivre: on aura affaire à une métalangue lourde, quasi dissuasive, qui est une sorte de croisement des métalangues propres respectivement à A.Culioli et G. Lazard . Bien qu'elle parle de "relation" d'entrée de jeu, on ne peut s'empêcher de penser que -ING porte sur le verbe seul, qu'il soit participe présent ou gérondif. L'emploi de ce dernier terme est très significatif car M.L. Groussier , face à une construction comme

Obstructing the doors is dangerous

nous dit bien que le gérondif "obstructing" est suivi du complémént direct "doors" alors qu'il est clair que -ING porte sur le verbe complexe OBSTRUCT THE DOORS.

L'auteur de la communication divise les adjectifs en deux catégories: ceux qui expriment un état temporaire (sick) et ceux qui renvoient à un état permanent(sick). Du coup les participes présents et gérondifs renverront au temporaire , où l'on retrouve une vieille connaissance, à savoir la distinction temporaire/permanent dont nous a parlé D.O'Kelly sous les espèces de is living et lives. Le participe présent-adjectif DROWNING dans "a drowning man" "renvoie à l'état temporaire précédant la mort par immersion". Bigre!

Venons-en à l'analyse d'énoncés authentiques . L'exemple (6) est le suivant :

(6) Hanson was leaving the building when his secretary called from the doorway to her office."I've just got a fax from Greater…"

M.L. Groussier propose de traiter BE+ING non pas comme une unité morphologique inanalysable mais comme une structure COPULE+ADJECTIF ATTRIBUT. Son interprétation est la suivante: "la forme BE+ING sera considérée comme exprimant la prédication du repérage-identification du référent du 1er argument par rapport à l'état temporaire exprimé par le participe présent". Ce qui est curieux c'est que l'on passe sans rien dire du participe présent LEAVING à une occurrence de "LEAVE BUILDING" et ce dans un paragraphe d'une complexité insoutenable: "Ce qui est prédiqué dans (6), ce n'est pas l'ensemble de l'événement correspondant à une occurrence de la lexis prédiquée (" Hanson", "leave", "building") mais une occurrence de "("Hanson", "be", "leave building" ), c'est à dire de l'état temporaire de Hanson en tant qu'Agent/Patient de "leave building". Je ne parle pas quant à moi de participe présent mais de prédicat nominalisé où -ING porte sur le verbe et ses compléments : -ING (leave-the- building). Ce groupe nominalisé , figé, est mis en relation avec le sujet grammatical par l'énonciateur qui a repéré la relation. Le recours au participe présent nous renvoie aux schémas linéaires traditionnels qui devraient être incompatibles avec toute métalangue à prétention moderniste. Pour revenir à l'énoncé (6) on dira simplement que Hanson était dans l'état "quitter l'immeuble" ou, en train de quitter l'immeuble où le métaopérateur DE signale le statut thématique (phase 2) du groupe verbal QUITTER L'IMMEUBLE .

La suite de l'article confirme nos craintes: on a beau parler de procès notionnellement bordable mais non-borné , on reste dans le déroulement de l'action (baptisée "procès") et l'inachèvement . C'est d'ailleurs dit expressément : "la valeur aspecto-temporelle de WAS LEAVING (on y revient!) ? eh bien " cette forme indique ici que l'énonciateur considère un moment où la deuxième borne, définie par the building, n'était pas encore atteinte". Mais n' était-ce pas de l'état de Hanson qu'il s'agissait en fait et non pas de savoir si oui ou non on avait atteint la borne de droite??

Le deuxième exemple est le suivant:

(7)(Le policier Parker se décide à faire acte d'autorité, dans une conversation téléphonique, pour contraindre le psychologue expert à venir à Manchester malgré le refus inexplicable de celui-ci)

"So you're coming to Manchester if I have to get you picked up and brought down here for questioning".

On a souligné le segment" you're coming "dans l'énoncé ci-dessus , ce qui montre de façon éclatante que l'analyse qui sera avancée sera un échec ! On se demande d'ailleurs pourquoi on n'a pas parlé du groupe COMING TO MANCHESTER à l'instar de LEAVING THE BUILDING proposé précédemment. Non, ici on parle de ("you", "be", "coming") et de la lexis ("you", "come"). Il est amusant de constater que l'auteur cherche à expliquer pourquoi la valeur aspectuo-temporelle est ici exclue : d'après lui le contexte indique que Hanson n'est pas en route pour Manchester . Je rappellerai ici l'énoncé "I am driving" qui met en relation "I" et "DRIVING" que l'on soit en train de conduire ou allongé ivre mort en bas du comptoir.

L'exemple suivant soulève un autre problème.Je n'en citerai que la partie dont nous allons nous occuper.

(8) She'd been dropping hints of late, and he didn't blame her.

On retrouve ici une valeur que M.L.Groussier avait attribuée à BE+ING il y a plus d'un quart de siècle (cf. Grammaire Anglaise et Thèmes Construits", Hachette 1973) à savoir "volonté du sujet"(entendez "sujet grammatical). Ici l'auteur parle d'intention et insiste sur la fonction d'agent du sujet "SHE". C'est se méprendre gravement sur une construction à base de BE complètement contrôlée par l'énonciateur où il ne saurait être question d'agentivité . J'insiste sur ce point depuis trente ans et je me souviens de la réaction d'un auditoire de professeurs d'anglais lorsque j'ai osé avancer cette thèse iconoclaste pour la première fois (Sèvres 1973).

Dans les Actes des Journées Charles V, un autre conférencier- il s'agit de J.C.Souesme- attribue cette même "valeur d'intention" au sujet grammatical du deuxième énoncé dans l'exemple suivant :

-He said he's coming next week.

-He's been coming for the last three months!"

Souesme n'a manifestement pas fait sienne ma théorie de -ING qui dit que le métaopérateur -ING porte sur le groupe verbal TOUT ENTIER , ici : COMING FOR THE LAST THREE MONTHS que l'énonciateur attribue en bloc au sujet grammatical . Ainsi s'éclairent des paires minimales coriaces du type ;

He has lived in China for twenty-five years

He has been living in China for twenty -five years

Où le premier énoncé présente une durée de statut rhématique et où le deuxième présente un groupe verbal complexe où twenty-five years est thématisé : live in China for twenty-five years.

Pour clore cette digression précisons que "be coming for the last three months est appliqué au sujet grammatical par l'énonciateur : il s'agit donc d'un jugement que ce dernier porte sur l'individu en question.

Un mot encore à propos de la forme BE+ING au passif qui est abordée à partir de l'énoncé ci-après:

(16) …From the moment that he had witnessed him being arrested, Hanson had been seized by the desire to learn what motivated people to kill.

L'auteur part du principe que HIM BEING ARRESTED equivaut à HE WAS BEING ARRESTED. Soit.. Elle ajoute que dans ce dernier énoncé "l'énonciateur qualifie celui que désigne HE comme étant dans l'état de participation à l'état de patient d'une occurrence de procès". Le moins que l'on puisse dire est que cela ne nous avance pas beaucoup dans la compréhension de ce type dénoncé. L'exemple retenu n'était décidément pas un bon point de départ pour étudier BE+ING au passif à moins que l'on se limite à avancer la valeur imperfective (aspectuelle!) de cette construction.

Un énoncé comme le suivant aurait permis de faire un premier pas dans l'analyse de cette forme :

He was aware that he was being followed by a plain-clothes detective.

On commencera par faire remarquer que -ING porte sur BE FOLLOWED BY A PLAIN-CLOTHES DETECTIVE, ce qui signifie que le statut du complément d'agent (comme celui de la première partie du sement) est thématique, contrairement à ce qui est le cas dans :

He was followed by a plain-clothes detective.

Avec la présence de AWARE dans l'énoncé de tête il n'est que normal que toute rhématicité soit exclue dans le prédicat de la proposition en THAT. C'est pourquoi:

*He was aware that he was followed by a plain-clothes detective

est agrammatical.

A partir de là on peut s'offrir un énoncé un peu plus substanciel, par exemple :

It was already a miracle that she was being transported to Bhagdad free of charge .

Le métaopérateur -ING thématise tout le groupe BE TRANSPORTED TO BHAGDAD FREE OF CHARGE , ce qui n'est que normal si l'on considère que la proposition en THAT fait écho à MIRACLE dans lénoncé introducteur. On voit donc que , comme c'est le cas dans les énoncés non-passifs, le prédicat tout entier est appliqué au sujet grammatical.

Enfin on ne peut passer sous silence ce qui se passe avec des adjectifs en position d'attribut :

You are being pessimistic (je vous trouve pessimiste) . L'anaphore est ici évidente: on devine le type de contexte-avant).

He is French versus He is being French .

Cette paire minimale offre le fonctionnement de BE+ING quasiment à fleur de langue: l'adjectif FRENCH dans He is French est de statut rhématique (parmi toutes les nationalités poqssibles, c'est FRENCH qui a éét retenu) alors que dans l'énoncé He is being French, le même adjectif est thématique car -ING porte sur BE FRENCH, où FRENCH est du donné (plus de choix paradigmatique)…On pourrait bien sûr poursuivre cette exploration. L'important c'est de proposer des schémas qui ne soient pas des culs-de-sac.

La conclusion de M.L. Groussier est surprenante : après la mise en œuvre d'une métalangue cognitiviste qui se veut innovante, elle propose une solution qui n'en est pas une, car on ne saurait considérer la pertinence ( la current relevance de Twaddell) comme une clé du marqueur BE+ING. Tout au plus s'agit-il d'une condition d'emploi qui est loin de pouvoir s'appliquer à tous les cas.