• 8- Nicholas Smith and Anna Siewierska (University of Lancaster) : "An Investigation of the Rise in Present Progressive in recent British English".(Colloque de Toulouse , juillet 2000).

Je me devais d'être présent à cette communication qui portait sur un sujet qui est mon domaine de recherche privilégié depuis plus de 30 ans. Je savais d'avance que j'allais être déçu, connaissant l'état de la problématique BE+ING dans la recherche britannique. S'il le fallait, la bibliographie figurant à la suite de l'abstract publié dans le programme du Colloque confirmait mes craintes car j'y trouvais les travaux de Comrie, Hirtle, Leech ou Schafer , qui, à mes yeux, représentaient l'approche taxinomique traditionnelle: la forme progressive avec ses avatars éculés : durée limitée, action temporaire, imperfectivité et j'en passe.

L'objet de cette communication était le suivant : étant donné la constatation de l'expansion de la "forme progressive" en anglais contemporain, il s'agit de déterminer les lignes de force de cette progression . Pour ce faire les auteurs de l'étude vont s'appuyer sur un certain nombre de critères tels que les distinctions aspectuelles, le sens des verbes (activité, activité mentale, verbes de communication etc.), les traits animé ou agentif, dynamique ou statique, la télicité etc.

Trois parties : d'abord une sélection de types d'énoncés présentant une extension de l'emploi de la forme progressive , puis l'exploitation de deux corpora d'un million de mots chacun (LOB 1961) et FLOB (1991) et enfin une page entière de statistiques en fonction des features dont j'ai parlé plus haut.

Ce travail me fait penser à la thèse de Buyssens "Les deux Aspectifs de la Conjugaison Anglaise" ( ) dans laquelle le linguiste belge s'était évertué , sur la base de centaines d'exemples, à montrer que la valeur fondamentale de BE+ING était …la durée! Ici les deux sympathiques présentateurs se sont fourvoyés dans une étude de type universitaire qui était condamnée à un échec total vu la faiblesse théorique de l'entreprise. Leur tort c'est d'avoir bâti leur travail sur des critères "sémantiques" les plus hétéroclites et de s'être satisfaits d'une terminologie de type "langue de bois": "extension to lexically stative verbs, temporary modes of behaviour, temporary states, developing processes, acquisition of pragmatic nuances etc". Deux examples concrets suffiront à expliquer la légèreté de l'entreprise :

L'énoncé que voici :

When you say that, you are calling me a liar ?

est pour les auteurs un exemple de "interpretative progressive" ( il est vrai que cette métalangue se réfère aux travaux de Buyssens (1968)). Comment peut-on espérer découvrir les cheminements secrets de l'expansion de BE+ING au moyen de tautologies de ce genre ?

Le deuxième exemple :

Mr.Kelf-Cohen asks if the members of the association are now prepared to give up £4 per week, but does he know what he is really asking ?

est l'occasion du commentaire suivant :

"Not clear how imperfectivity interacts with the Interpretative progressive". On reste pantois devant un galimatias de ce genre mais est-il vraiment plus grave que ce que l'on trouve très souvent chez nous lorsque par exemple on dit que dans tel cas une action perfective est exprimée imperfectivement , ou l'inverse ?

Des travaux de ce genre posent un problème de déontologie de la discipline linguistique.